Chapitre 7 – Joseph

Il s’agit de la seconde partie du feuilleton psycho-sociologique. Dans cette partie, retrouvez le récit d’une même soirée du point de vue de chaque personnage… 

Commençons avec Joseph…

Joseph pose le pack de bières sur la table de la cuisine. Pas très fraîches. Entre les espadons congelés et le sorbet citron, seulement trois peuvent s’intercaler. Mais ça suffira le temps du trajet et du premier quart d’heure de la soirée. On avisera après. Une chemise en jean et un pantalon noir. Ni trop élégant ni trop négligé. Un combo parfait pour exprimer la nonchalance qu’il aspire incarner. Il repense au parfum encore emballé que sa mère lui a acheté. Là ce serait approprié. Zut, il est si agité que le flacon est tombé. Il ne l’a jamais senti. Aqua Di Gio d’Armani. Une point de citron et de jasmin. C’est plutôt pas mal, ça lui plaît. Quelques sprays derrière les oreilles. C’est pas comme si il allait choper, mais mieux vaut s’habituer.


-Joseph ? C’est quoi ?
– Non, c’est rien j’ai fait tomber mon parfum mais il est pas cassé.
– Tu te parfumes ? Y a des filles ce soir ?
– Euh oui.
– Ah le p’tit coquin. On dirait pas, mais tu caches bien ton jeu. Tu veux que je te donne une technique ? Quand j’étais jeune je faisais ça dès que je pouvais. Ça marchait à tous les coups. Tu repères celle qui te plaît. Tu t’arranges pour te mettre derrière elle et quand elle fait un mouvement tu lâches ton verre. Logiquement elle va s’excuser et te proposer de t’aider. Dans la salle de bain tu es torse nu et là t’engages la conversation et tu te rapproches progressivement. Si la salle de bain ferme, le tour est joué. Sinon faudra patienter la fin de la soirée.
-(rires)
– Moi j’en ai eu des aventures comme ça. Une Brésilienne, une Argentine, une Chinoise, une Coréenne, une Espagnole et une Portugaise. Je voulais faire tous les pays à l’époque. J’en suis pas très loin remarque aujourd’hui. J’t’ai déjà raconté l’histoire sur le bateau avec la Chilienne ?- Euh…
– Bon ce sera pour une autre fois, parce que c’est long et faut qu’je finisse un papier avant 20h. Mais elle était complètement cinglée. Une hystérique. Jalouse, possessive, l’enfer. Presque pire que ta mère, c’est dire. Mais c’est drôle. J’en garde un sacré souvenir. Et ça fait une bonne anecdote à raconter. Mais si j’peux t’donner un conseil, fais gaffe quand même. Y en a beaucoup qui ont des dady issues et qui vont te coller. Qui vont piquer des crises dès que tu sors respirer. L’avantage c’est qu’souvent elles sont à tes pieds. Au sens propre comme au sens figuré si tu vois c’que j’veux dire…Enfin tu verras. C’est bien aussi. Faut alterner. T’es jeune de toutes façons faut tout tester.
-(rires).
-Bon j’y vais mon salaud.


Joseph reste figé. Immobile devant le miroir. Il a même oublié de respirer.

– Attend avant que j’m’y colle, j’vais te raconter la dernière quand même. Au journal y a une Italienne qui est arrivée y a deux semaines. Une poitrine…Deux melons mais hyper fermes. Un régale. Ça fait plusieurs jours que je manœuvre pour l’inviter à dîner. Mais je suis discret parce que c’est une stagiaire et à cause de toutes ces histoires, la rédaction est un peu casse-couille sur le sujet. Mais j’ai réussi à avoir son numéro par la secrétaire, j’ai dit que j’voulais l’associer à une enquête. Ça fait deux trois jours qu’on se textote. J’pense que c’est joué. Regarde ! Elle a l’air cochonne en plus.
– (rires).
– Bon j’y retourne, amuse-toi bien ! Tu m’raconteras qui t’auras déniché.

 

Vite, une canette. Joseph se sent suffoquer. Il manque de sommeil, ça doit l’empêcher de bien respirer. Il la boit d’un trait. Ding. « Mec, on est là dans 10. J’espère que t’as la tise ». Il met un pouce et se dépêche d’avaler les autres bières avant de fourrer la vodka dans son sac à dos. Un petit détour par la salle de bain. Il a vraiment une gueule d’alcoolique. Ça se voit sur sa tronche qu’il descend trois fois la dose limite. Décidément il est fébrile, il failli oublier ses feuilles à rouler. Sur sa table de nuit, le porte-cigarette que son père lui a offert au dernier marché aux puces. Il hésite et l’embarque. Son père est un warrior, cet objet lui permettra peut-être d’avoir le mindset approprié. Quand il sera gêné, il pourra sortir lentement ses cigarettes avant de fumer, ça lui donnera une bonne raison de rester muet.

 

– Yo mec, ça va ?
– Toi ?
– T’as vu sur Twitter ? Carpentier s’est fait défoncer.
– Ouais c’est clair. Il l’a bien cherché. Tellement abusé son commentaire.
– En même temps j’suis pas surpris.
– Ah ouais ? J’pensais qu’il était à gauche moi. Genre pas gauche radicale mais quand même t’sais. Là quand même c’est chaud.
– En même temps, l’autre jour son cours sur la violence légitime c’était limite quand même.
– Mais oui on en parle ! Le mec est pas du tout neutre t’sais, pour lui c’est normal que l’État fasse usage de violence pour maintenir l’ordre.
– Il était déchaîné. J’suis sûr, chez lui faut pas moufter. À tout moment tu t’prends une claque, mais comme elle est légitime ça va.
– Paraît qu’il a une meuf.
– Dur. J’la plains.
– Ça t’dérange si on passe chercher Clarisse ?
– Tu la charbonnes toujours ?
– Mec, c’est sérieux.
– Comme Garance ?
– T’es trop con.
– Mais genre c’est sérieux comment ? Tu t’vois en couple avec elle ?
-Tout d’suite les grands mots. Nan en couple p’t’être pas quand même. On est trop jeune pour s’poser. Mais j’veux dire j’la kiffe bien, donc j’ai envie que ça dure un minimum quand même.
– La trompe pas cette fois.
– J’l’ai pas trompée ! On était pas ensemble.
– Ça fait pas l’unanimité si j’ai bien compris.
– On avait jamais dit qu’on était en couple, et encore moins exclusifs. J’aurais jamais accepté. Ça a toujours été clair que c’était que pour niquer. Après elle s’est attachée et j’en suis désolé. Mais c’était pas le deal.
-T’inquiète mec j’te chambrais. Je sais.
-Mais là c’est quoi le deal avec Clarisse du coup ?
-Pour l’instant y en a pas. On a pas parlé d’ça. Mais j’ai pas spécialement envie d’avoir de discussion méga profonde sur le sujet. On est bien comme ça, y a pas besoin d’mettre d’étiquette. On s’voit quand on a envie, y a pas d’attente, on s’prend pas la tête. Si un jour on a plus envie d’se voir, on s’voit plus. C’est fluide. Pas de drama.


L’appartement est bondé. Plein de têtes déjà croisées en cours, à la fac ou dans le local de Solidaires. Ça lui arrive d’y aller. Jo donne son avis seulement si on vient le chercher et à la condition qu’on lui témoigne de l’intérêt, qu’on lui montre que son avis est apprécié. Jo a horreur de parler dans le vide. Et encore plus d’être coupé. Quand il s’exprime, c’est toujours avec condescendance. Il ne le fait même pas exprès, parfois c’est carrément contre son gré. Il y en a bien certains qu’il méprise au plus profond degré. La vérité, c’est qu’il a toujours peur d’être agressé. Alors il a besoin d’une protection. La fuite. Soit la sienne, soit celle des autres face à sa méchanceté. Une armure robuste pour se tenir à l’écart des coups. De toute façons, les débats ne servent à rien, tout le monde a déjà des idées arrêtées. Et puis, bon sang, il faut réfléchir avant de parler. Si c’est pour entendre déblatérer les mêmes bêtises, mieux vaut se préserver. La vérité c’est qu’il est terrorisé. À tout moment sa carapace pourrait craqueler.

 

Autour de lui, plusieurs petits groupes éparpillés. Il a l’embarras du choix. Les bras ballants, l’air hagard, il croupit seul dans un coin. Il n’aime personne. Entre ceux qui sont débiles, ceux qui sont bébés et ceux qui sont prétentieux, il ne reste pas grand monde. S’il est honnête, le problème c’est surtout que personne ne lui prête attention. Or, pour exister, il a besoin d’être le centre d’intérêt. Et en même temps, il ne peut pas le supporter. Alors il ne lui reste plus qu’à s’extraire de la soirée en plongeant dans ses rêveries pour s’évader. Y aussi des filles qui commencent à danser et des gros lourds qui essaient de les serrer. Subitement, une vague de dégoût met en branle tout son corps, de ses orteils au sommet de son crâne. Il les méprise tous, il les arbore tous. Il est gavé par leur médiocrité. Il a le sentiment d’étouffer dans l’insignifiance de cette soirée. Il veut s’échapper. Mais Gaby et Gaspard n’ont pas pris de MDMA. Ils ont dit : pas pour les soirées random, il ne faut pas s’habituer. Pas de discussion, on garde ça pour de grandes occasions. Lui ça ne l’aurait pas dérangé de s’accoutumer. Tant pis pour les lendemains de soirée cloués au lit, nauséeux et déprimés. C’est pas comme si c’était la folie quand il n’avait rien pris. Un peu moins assommé, un peu plus d’appétit mais sans grand énergie. Une petite déprime. Clairement, il était prêt à toucher le fond pour quelques minutes d’intenses émotions.

Dépité, il repère enfin le buffet. S’empare d’une bière à la volée. Quelques regards furtifs aux alentours pour décider quel sera son prochain move. Opération cocktails lancée. Il teste plusieurs mélanges et en profite pour avaler de grosses gorgées sous prétexte de les goûter. Soudain, il se sent rassuré. Faut dire qu’il commence à être bourré. En plus barman, ça pourrait être sa spécialité. Ça devient plus facile d’interagir, de rigoler. Au loin, Gabriel et Clarisse en train de se taquiner. Dans quelques minutes, ils vont se choper. Un reflux d’angoisse. 19 ans déjà. Il n’a jamais couché. Il s’agirait de se dépêcher. Dans sa tête, les paroles en boucle.

 

« Salut c’était moi le dernier puceau, Dans la partie, j’ai perdu à zéro-zéro, Mes yeux sautaient comme des pop-corn, J’ai payé un workshop sur youporn »

 

La mélodie devient entêtante. Dans sa tête, ça chante, ça crie, ça se mélange.

 

« Moi, je faisais tout pour qu’on me voie dans la cour Mais je devenais tout rouge quand on parlait d’amour Toutes mes romances étaient imaginaires J’avais trop peur d’aimer, j’avais trop peur qu’on m’aime

Et je faisais du bruit pour ne pas m’écouter Dans ma tête y avait des questions qui tournaient Pourquoi je suis tout seul, pourquoi j’y arrive pas ? Pourquoi est-ce que tout le monde l’a déjà fait sauf moi ? »

 

Un mec qu’il ne connaît pas lui propose de fumer. Il a l’air complètement déchiré. Joseph tire quelques taffes. Avec les Long Island, ça commence vraiment à faire effet. La réalité n’est plus qu’une séquence d’images éloignées, qu’il perçoit de loin, l’esprit embué.

 

Nina est là. Elle parle depuis quelques minutes ou bien une éternité – ses repères temporels sont tout emmêlés. Tout lui échappe. Pourtant, il semble assurer. Elle ne cesse de rigoler. Spectateur, il s’observe discuter avec une fille en soirée, la faire rire, la séduire ? Il semble la captiver. Ses copines viennent la chercher. Mais elle reste sans broncher. Ses copines essaient de la tirer pour danser. Mais elle reste discuter. Pour Joseph, la sidération et aucune action. Il est dépassé, il est excité. Dans le creux de son oreille, il l’entend murmurer. Viens ? Il n’a pas saisi mais il sourit. Il a toute son attention. Il la suit. En dehors de lui. À cet instant, il ne sait pas qui il est. Son corps qui avance lui est étranger. Lui est submergé par une bouffée de fierté ! Et le réconfort. On est si bien dans une peau neuve, qui n’est pas encore abîmée. Il est grisé. Grisé par l’alcool, grisé par l’allégresse d’être un autre que lui. Il espère fort que ça ne va pas échapper aux trois G. Il se sent toujours un peu à côté, et pas seulement parce que lui c’est J et pas G.

 

Mais le gris vire au noir. Trou noir.

 

Une chambre très sombre. Rien n’est allumé. Il se cogne le doigt de pied. Douleur lancinante et retour à la réalité. Une faible lumière provient de la fenêtre ouverte. La silhouette de Nina qui se rapproche. Il n’a pas le temps de processer. Elle lui mordille la lèvre. Lui, mange ses cheveux. C’est filandreux. Pause. Elle s’attache les cheveux. Toujours médusé, Joseph n’a pas bougé. Ses mains à lui sur ses fesses. Et son érection qui l’enserre. Tout se mélange dans son esprit. Mais il est tellement amorti. Ses pensées sont vagues et molles. Elles s’estompent et s’évanouissent à peine formées. Une étincelle : Je vais baiser, tellement stylé ! Simultanément un autre éclair : Nina est en face de moi. La matérialité de sa langue dans sa bouche le dérange. On dirait qu’elle est granuleuse. Cette salive, ces lèvres pulpeuses, un semblant d’écœurement. En même temps avec les litres qu’il a sifflés, pas étonnant qu’il ait la nausée. Déstabilisé. Il se fige tandis que sa braguette est déjà baissée. « Attends, c’est une mauvaise idée ». À genoux, Nina relève la tête de son caleçon, dans un sourire : « T’es trop timide toi. Laisse-moi faire. Panique pas, tu vas kiffer. » Joseph ne bouge plus. Il se déconnecte. Mode robot activé. C’est d’autant plus facile qu’il n’en a pas envie. Et Joseph est habitué au goût amer que provoquent les gestes et les actes que l’on fait sans les souhaiter. Pour lui c’est la banalité.

 

Une meuf est en train de le sucer. Il est sonné, c’était tellement inespéré ! Le va-et-vient de sa bouche lui procure quelques sensations de plaisir. Pas autant qu’espéré. Bientôt plus rien. Simplement l’image du haut de son crâne qui avance et recule. Elle ne va pas assez loin. Des flash de gorges profondes. Il veut du sale. « Suce moi les boules ». Un ordre. Une voix rauque. Est-ce lui qui a parlé ? Avec brutalité, il lui attrape la tête et la prend comme un ressort. « Va plus vite ». « Plus vite ». « Arrête pas ». « Non, continue ». « Allez vas-y ». Il voudrait qu’elle le morde, qu’il ressente quelque chose putain. Mais qu’elle est lente ! Et puis non, d’un coup cette langue visqueuse sur son pénis le dérange. Elle bave cette salope. Un flot de rage le traverse. Elle le dégoûte. Il la relève et la couche sur le bord du lit. La fermeture éclair de sa jupe dézippée, son string arraché, il la pénètre d’un coup sec. La Nina entreprenante s’est évaporée. Mais il ne la regarde pas, il ne la voit pas. D’ailleurs, il ne voit rien. Il continue, il accélère. Il en veut plus, il en veut plus. La quête de plaisir vire en recherche de salvation frénétique. Il y va de toutes ses forces. Ses musclent se contractent au-delà des crampes. Des goûtes de sueur perlent sur son front et roulent sur ses joues. Dans son dos des flaques se forment. Il est eau, il est feu. Et d’un coup, plus rien. Son énergie s’est dissipée. Il n’aura pas éjaculé. Pourtant, ça fait déjà longtemps qu’il a arrêté de bander. Une loque gît sur le couvre-lit désormais froissé. La fureur s’évanouit aussi vite qu’elle avait surgi. Maintenant c’est la honte qui l’inonde tout entier. Toujours bourré, l’esprit embué, il ne peut plus rien démêler. Il sort avec son baluchon d’émotions pas digérées qu’il s’empresse de remballer.

 

Le reste de la soirée est confusion.

 

Joseph a fini par s’endormir pour décuver. C’est Gabriel qui vient le réveiller. « Viens mec. Gaétan et Gaspard nous attendent, on va prendre un petit déj chez Dédé ». Tous ces sons, tous ces chuchotements, toutes ces voix. Cacophonie. Ça vibre, ça résonne. Il a envie d’hurler. Mais il reste muet. Il se relève, prostré et se dirige vers l’entrée.

 

– Alors Gaspacho, t’as pécho Chloé ?
– Non j’voulais pas forcer.
– Mec, elle est à fond sur toi.
– En vrai j’suis pas complètement sûr. Parfois j’ai un peu des doutes. Genre on s’envoie beaucoup d’messages et tout mais elle essaie pas forcément de créer un rapprochement tu vois.
– Mais elle est juste super timide, j’pense qu’elle a jamais eu d’mec. Elle flippe. Faut qu’tu prennes les choses en mains. Les meufs elles attendent que ça t’façon, un mec qui prenne les initiatives. J’te jure fonce.
– Ouais…Mais hier par exemple, elle était un peu distante j’ai trouvé. Limite fuyante…
– J’pense que le contexte soirée, elle est pas habituée. T’en penses quoi Pélican ? Vous en avez parlé l’autre jour au musée ?
– On a pas parlé d’ça du tout. Mais un mec comme Gaspacho, c’est exactement ce qu’il lui faut. Et j’suis dac avec Gaby, elle est assez réservée.
– Bon…On verra c’que ça donne demain. On va au Centre Pompidou.
– Mdr, le canard !
– Tu peux parler Jo. Nina tu l’as travaillée au corps askip.

 

Joseph sent ses joues chauffer. Il est encore un peu déphasé. Sonné par la nuit qu’il vient de passer. Alors sans réfléchir, il commence à parler.

 

– C’était assez bizarre en fait…elle était super entreprenante…Je sais pas, moi je l’aime beaucoup Nina mais euh…elle me plaît pas
– Vous avez ken ?
– Euh ouais. Mais je sais pas, elle était vraiment super entreprenante, je sais pas, j’étais un peu mal à l’aise…
– Mec, non… « Ouais la meuf elle m’a trop chauffé, moi je m’en battais les couilles mais qu’est-ce que vous voulez elle m’a sauté dessus ». Pas ça. Pas toi. On est au-dessus de ça, Nina c’est une meuf géniale, et elle est super mignonne. Vous avez ken, ça veut pas dire que vous allez vous marier, chill.
– Non mais pas du tout, je la respecte trop pour ça. Je sais pas, c’est juste que je la voyais pas comme ça.
– T’es pédé ?
– Not safe bro.
– T’abuses Gaby franchement.

(Rires)

– Non mais t’as raison, j’vais pas m’plaindre. C’est juste que j’m’y attendais pas du tout. Au début j’étais pas prêt j’crois. J’ai pas du tout anticipé le bail. En plus j’étais rébou du coup j’me souviens plus bien comment ça s’est passé. Mais j’crois que j’ai pas vraiment compris c’qui s’passait. Mais après, c’est clair que j’allais pas dire non.
– Ouais normal mec, elle est super bien roulée Nina.
– Pas faux. Mais il m’est arrivé un truc trop bizarre. J’sais pas si ça vous est d’jà arrivé… Comme si, je sais pas, j’étais dans mon délire. Je sais pas ce qu’elle a pensé d’moi. J’espère que je l’ai pas choquée. J’suis un gêné je sais pas…
– Rassure moi, tu l’as pas violée ?
– Non bien sûr que non mec ! Tu m’connais. Et puis je t’ai dit, c’est elle qui a initié le truc, c’est sûr elle était chaude. C’est plus après j’espère qu’on a pas fait des trucs trop sexuels… En mode j’sais pas trop c’qu’elle habituée de faire.
– Ah d’accord je vois. Vous avez fait des trucs cochons. Fallait l’dire tout d’suite mec. Tu m’as fait peur. Non mais alors pour ça t’inquiète. De un, les meufs adorent ça, même si elles l’assument pas.
– Ah ouais elles l’assument pas ?
– Ah ouais mais ça c’est un basique. Surtout quand elle sont féministes, elles le reconnaîtront jamais mais en privé tu verras, elles adorent être soumises. Qu’on leur tire les ch’veux, qu’on les étrangle, les fessées. Qu’on les insulte aussi. Les meufs sont plus cochonnes que les mecs, faut pas croire. Et de deux, Nina elle est pas innocente…. Elle aime le sexe ça s’voit. Donc j’pense qu’elle était aux anges.
– Ah ouais ? Garance et Clarisse elles aiment le sexe un peu… hard ?
– De ouf. Après avec Garance c’était pas génial sexuellement. Ça va mais c’était pas le kiff non plus. C’était pas un bon match.
– Ah ouais ? Tu t’en es aperçu quand ?
– Ah bah tout d’suite hein. Genre déjà la première fois c’était pas ouf. On était pas super compatibles.
– Mais t’as quand même voulu la revoir ?
– Ouais c’était pas incroyable mais c’était bien quand même hein. Mais par contre j’savais que ça allait pas non plus durer dix ans.
– Et avec Clarisse
– Non avec Clarisse c’est un super match. Ça a tout de suite été très bien, même la première fois.
– Mais après là c’qui est p’t’être un peu plus chaud c’est qu’on est pas ensemble, enfin même pas en couple, mais on a pas d’relation suivie…
– Osef. Vous étiez deux adultes consentants, à partir de là ce qui s’est passé ça vous regarde mec.

 

Il ne va plus y penser. Et pourtant, dans le fond, quelque chose ne tourne pas rond.

 

Après les toasts grillés chez Dédé, Joseph finit par rentrer. Il est seul chez lui. Son père a probablement découché ou bien il est sorti déjeuner. Un doliprane, et il va s’allonger. Il est beaucoup trop fatigué. Sur la table de la cuisine, les bières du pack entamé, qu’il a laissées hier avant de décamper pour la soirée. Affalé sur le canapé, il va sur la chaîne de son Youtubeur préféré.